Matthieu, 23 ans
Pélerin-cycliste 2018
â—‡ Reprendre goût à la prière
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Suite à nos retrouvailles de fin d'année à Orléans, chez la bienveillante communauté des Frères de St-Jean, j'ai cru bon d'écrire à mon tour mon témoignage rétrospectif sur le grand M de Marie 2018 auquel j'ai eu la grâce de participer. Et ce d'autant plus que nous préparons d'ores et déjà la prochaine édition !
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C'est par le magazine Famille Chrétienne et par l'intermédiaire de ma mère hyper-mariale que j'ai appris l'existence du grand M. Comme je suis un mordu de périples à vélo et très porté vers les voies de pèlerinage -et à plus forte raison celles qu'il reste à frayer !- j'ai tout naturellement bondi sur l'occasion de m'assembler à d'autres cyclo-pèlerins de mon acabit.
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Si la foi de mon enfance a été mise à rude épreuve par des études de philosophie souvent irréligieuses, j'ai conservé une certain attachement à la Vierge Marie, ravivé par la lecture bouleversante du Traité de la Vraie dévotion... de St Louis-Marie Grignion de Monfort au cours d'une retraite à l'abbaye de St-Wandrille-de-Fontenelle.
C'est seulement à Paris, au moment de la "relève" des troupes, que je me suis greffé à la fine équipe du grand M emmenée par un couple de fiancés exemplaires, j'ai nommé Clarisse et Thibaut. De fait, le plus clair du temps, ces derniers et moi-même formions souvent la tête de proue de notre pieux peloton, ouvrant la route et entraînant nos coéquipiers en roue libre dans notre sillage semé plutôt de grâces que d'embûches !
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â—‡ Cesser de faire cavalier seul
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Je dois préciser ici qu'étant habitué au pédalage intensif en solo sur de longues distances en vue de la performance sportive et de visites culturelles prolongées à mon gré, il m'a fallu m'adapter à la dynamique de groupe spécifique où Grand M où l'effort est d'abord expiatoire et la prière quasi continuelle. Ainsi ai-je dû réduire progressivement ma vitesse de croisière pour ne pas faire bande à part, quitte à m'infliger la lanterne rouge en m'obligeant à rester derrière le membre le plus lent de notre équipe.
À la règle de solidarité s'est ajoutée celle du chapelet quotidien, contraignante dans l'immédiat mais libératrice dans la durée. Heureusement pour moi, au lieu de le réciter d'une seule traite avec une attention déclinante, nous l'égrenions au cours de l'étape du jour, comme son sème des pétales au vent, choisissant tantôt un calvaire solitaire tantôt une chapelle romane bordant la route pour y offrir une dizaine féconde.
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Aussi, au lieu du traditionnel bivouac en forêt qui me tient à cœur, nous étions hébergés en fin d'étape chez l'habitant, généralement un couple de fidèles paroissiens désireux de soutenir notre mission. Ce mode d'hébergement, certes plus commode que la tente, m'est vite apparu comme un moyen efficace de diffuser notre message apostolique. En effet nous avons cherché, discrètement mais non moins résolument, à redynamiser par notre présence active les franges ou 《périphéries》de l'Église de France, à commencer par les campagnes déchristianisées et autres zones périurbaines où l'on a délaissé les autels rustiques pour l'hôtel aux tropiques...
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En tant qu'étudiant en histoire de l'art, je me suis également réjoui que nous réinvestissions au son de nos cantiques le patrimoine religieux français et que nous contribuions de la sorte à le faire rayonner et résonner dans sa vocation initiale. Que ce soit sous l'imposant clocher-porche de Paray-le-Monial ou face aux bras du transept rescapé de labbatiale de Cluny, nous n'avons pas rougi de proclamer les noms du Sacré-Cœur et de saint Benoît sous l'invocation desquels ces édifices bourguignons sont placés. Nul ne doit se résigner à voir les marchands ambulants envahir le Temple ni nos églises désacralisées faute de fidèles !
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â—‡ Exultate ! Jubilate !
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Si j'avais un seul souvenir à évoquer ici, ce serait immanquablement celui de notre arrivée tant espérée à La Salette, terme de notre Tour de France christique parce que marial. Après une rude ascension iséroise depuis Grenoble et plus de 2300 kilomètres abbatus au total, quel ne fut pas notre soulagement lorsque la silhouette de l'ultime sanctuaire se découpa en surplomb du grand cirque rocheux à la végétation rase que nous gravissions à grands renforts d'Ave Maria - en l'entonnant à la façon chartraine jugée plus galvanisante en latin !
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Le lendemain, fête de l'Assomption, une fois la grand-messe célébrée sur le parvis bondé, nous nous sommes réunis une dernière fois autour de la statue en bronze de Notre-Dame de la Salette. Nous n'étions plus que sept cyclo-pèlerins présents, au nombre des Sacrements et des Dons du St-Esprit qui sont autant de boucliers à brandir contre leurs insidieux antonymes que sont les péchés capitaux. C'est alors que, unissant l'action de grâces à la demande d'intercession, nous avons par sept fois chanté le vibrant hymne du Totus Tuus. L'un après l'autre on allumait un lumignon en silence et se mettait à genoux aux pieds de la Madone, à l'image des bergers enfantins Mélanie et Maximin, lui confiant son intention principale dans le secret d'un cœur fervent.
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Puis, notre pèlerinage entériné, nos chemins se sont ramifiés aux quatre vents. Autant d'amitiés fortes scellées par une foi partagée et le goût de l'effort. Ô combien de paysages nous avons traversés d'un seul corps, combien d'hymnes nous avons chantées à l'unisson, combien de cœurs nous avons consolés ! Et peut-être, Dieu aidant, quelques âmes sauvées ?
En avant pour le grand M 2019 !!
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In Christo per Mariam